Au-delà de sa position stratégique, l’influenceur ne serait-il pas la solution pour humaniser les entreprises ?
Quand on parle du marketing d’influence, en toile de fond, on parle d’humanisation de la relation marque/consommateur.
Si l’on prend un peu de distance, la première chose qui vient à l’esprit, c’est l’échec de l’entreprise à se donner un visage humain dans sa façon d’être, de communiquer auprès de son public (prospects, clients, candidats).
Comment une entreprise, sans visage, qui ne parle que de bénéfices, de ROI, de KPI peut à un moment vouloir jouer la carte de la proximité, sans présence réelle, sans empathie, sans rapport humain.
C’est donc au travers de l’influenceur que l’entreprise cherche aussi à créer ce lien de confiance entre elle et ses prospects, ses clients.
Un positionnement inconfortable
Malheureusement, tout n’est pas aussi simple que cela pour ces entreprises. D’une part, elles doivent faire à la pression des marchés financiers, des actionnaires, et présenter des bénéfices.
D’autre part, le consommateur mûrit plus vite depuis quelques années. Il veut des produits responsables, des entreprises qui ne fabriquent pas n’importe où pour tirer les coûts de production vers le bas et pour vendre plus cher encore afin de s’assurer des marges confortables. Du moins, cette conscience consommatrice s’installe peu à peu dans l’esprit des gens.
Cette double communication, véritable numéro d’équilibriste, brouille l’image de la marque auprès du consommateur, qui n’associe pas « humanisation » et « millions de bénéfices ». D’ailleurs, l’actionnaire, l’humanisation, ce n’est pas son problème. Lui, ce qui l’intéresse, c’est « gagner des millions, et encore des millions, toujours plus de millions ». La faim (de dividendes) justifiant tous les moyens.
SOS Influenceur : humaniser l’image de l’entreprise
Le mot d’ordre est donc d’humaniser la relation avec le client. Ainsi, le marketing d’influence apparaît comme une excellente solution. L’entreprise se rapproche d’un influenceur, proche de sa communauté ; on fait passer le message de l’entreprise via l’influenceur et voilà !
Et voilà… et voilà, voilà pas grand-chose en fait. Parce que l’influence, ce n’est pas aussi simple que cela dans les faits.
C’est bien de vouloir humaniser, mais voilà, ces entreprises sont face à un cruel dilemme : l’influence ne se mesure pas aussi simplement qu’il y paraît !
Ce n’est pas un nombre de RT, de like, ou de followers qui donnent une vision de l’influence d’une personne, aussi puissante soit-elle.
L’influence agit dans le temps, elle se construit sur la base d’une relation entre des personnes et ne porte ses fruits qu’avec le temps. Mais le temps pour une entreprise, c’est de l’argent. Et une entreprise ne veut pas prendre le temps. Elle doit aller vite pour exister dans un univers ultra concurrentiel.
Entreprise, influenceur et informations
Elle n’a déjà pas le temps de nouer de réels liens en interne avec ses propres composantes, alors créer du lien avec des gens de l’extérieur, qui ne connaissent rien aux « valeurs » de l’entreprise ? Vous plaisantez ?!
Il est un autre problème. L’influenceur. Lui, il ne souhaite pas forcément parler avec la personne du marketing ou de la communication. Parce qu’il « vend » et bien souvent utilise le produit, il veut parler avec celles et ceux qui le conçoivent afin de discuter du produit, de ses orientations. En gros, il veut participer à la vie du produit. Aujourd’hui, rares sont les entreprises ayant ce degré de relation avec leurs influenceurs.
L’entreprise doit donc se réinventer en interne pour utiliser pleinement ce canal qu’est l’influence marketing. Il faut mettre en face de l’influenceur une personne qui va « casser » les silos si chers à la direction qui souhaite contrôler comment circule l’information en interne.
L’entreprise, les silos et l’influenceur
Elle va devoir créer un poste transversal pour communiquer aussi bien en interne qu’avec le monde extérieur et briser son précieux silence, elle va devoir en montrer un peu plus que ce qu’elle veut bien montrer. C’est le prix de la transparence. On en revient à des rapports plus authentiques, ceux qui existent entre deux humains.
Le deal est simple, donner de la transparence pour obtenir de la confiance.
Ce poste, en interne, n’est pas si simple. Parce que ce nouvel entrant devra communiquer avec un grand nombre de services dans l’entreprise et se heurtera donc à la rétention d’informations, la concurrence entre services, la guerre des chefs.
En outre, la personne qui occupera le poste devra avoir des compétences multiples. Elle devra intégrer les produits de l’entreprise, de la conception à la production, la communication autour de ces produits, une connaissance des clients, de leurs doléances, de leurs envies, et entretenir la relation avec les influenceurs.
L’information, le pouvoir et la transparence
Tout ceci demande donc une certaine libéralisation de l’information dans l’entreprise. Pas simple quand on cultive l’omerta depuis toujours. Parce que qui dit transparence, dit information. Et là, on touche au sacro-saint problème. À l’essence même du pouvoir dans l’entreprise.
Il faut arrêter de se mentir. L’information c’est le pouvoir. Et au sein des entreprises, les luttes d’influence pour le pouvoir sont monnaie courante. L’information est donc un bien précieux, et la voir circuler librement est encore une vision utopique par chez nous.
Pourtant, pour se rapprocher du public, de l’influenceur, du marché, pour créer de la confiance, il va bien falloir libérer l’information. Sans tout dévoiler, car certaines d’entre elles sont réellement stratégiques. La libre circulation de l’information va devenir un enjeu crucial pour tirer pleinement profit du marketing d’influence.
Cette libre circulation pose sans doute bien moins de problèmes dans une petite structure, ou chacun est à sa place, ou tout le monde connait tout le monde, et où les gens savent ce qu’ils font et pourquoi ils le font.
L’entreprise, la relation, l’engagement
Si vous avez déjà bossé dans un grand groupe, vous savez tout comme moi qu’il est compliqué de se sentir impliqué quand on est en bas de la pyramide. On ressent la pression, on s’entend dire que l’on est remplaçable, bref, on ne compte pas vraiment. Réhumaniser avez-vous dit ?
L’humanisation, avant des moyens techniques, avant des mesures, c’est prendre en compte la dimension humaine de la relation. L’écoute, le respect, le temps. Bien entendu, il est tout à fait possible de continuer en se limitant à une relation simplement tarifée qui transforme l’influenceur en panneau publicitaire vivant. C’est possible.
Malheureusement, le consommateur se montre déjà méfiant vis-à-vis de cela. Il veut quelque chose de plus engagé, plus engageant. La marque veut humaniser ? Bien ! Alors qu’elle s’engage vraiment dans la relation.
Que retenir ?
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L’influenceur n’est pas un panneau publicitaire (je sais, c’est choquant)
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Le consommateur n’est pas un simple porte-monnaie (oui, c’est aussi choquant)
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La structure des moyennes et grandes entreprises doit s’adapter pour être plus transversale afin de fluidifier la communication
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L’influenceur doit avoir un interlocuteur privilégié pour susciter la confiance
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L’influenceur doit être inclus dans la communication d’entreprise